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LE CRACHEUR DE FEU

« Les sons des tambours résonnent dans le village, des cris et des chants se confondent pour donner naissance à une danse des plus énigmatique. Les visages sont, eux absents, un masque recouvre leur tête et dissimule les gesticulations faciales. Seul l’apparition de cornes élancées apparaissent au sommet de ce visage animalier. Est-ce une antilope, une hyène, un crocodile ou un buffle ? La composition est difficile à affirmer. Son regard est, lui, féroce, il transcende celui qui le regarde et le magnétise de ces yeux. Attention à celui qui s’approche, sa gueule pourrait l’anéantir d’une bouchée de ces dents pointues. Et du feu pourrait même en jaillir. Crainte et fascination se ressentent au sein de ce groupe fermé unis par le pouvoir du cracheur de feu. »

 
Courtesy of: Fagg, Ohio, 1968

Courtesy of: Fagg, Ohio, 1968

 

Ce masques zoomorphe wanyugo peut durant les danses évacuer de la fumée ou des étincelles, ce qui lui a valu le nom de « cracheur de feu ». Reconnaissable par son aspect agressif avec une gueule de crocodile ou de hyène et des défenses de phacochères, ce masque était consacré à la société d'initiation Bamana traditionnellement nommées Poro

Le Poro est le pilier de la vie communautaire. Chargé de l’initiation et de la formation des jeunes garçons, il vise à former un homme social accompli, l’intégrer dans la collectivité et lui permettre d’accéder à des responsabilités publiques. La société Poro, association très puissante, se compose de trois grades et crée un esprit de fraternité et d’une entraide permanente entre les membres d’une même classe d’âge. Un villageois qui n’aurait pas été initié serait exclu du village et perdrait ses droits de citoyen. 

Les masques-heaumes sont perçus par les Senufo comme violents dont les pouvoirs permettent de maintenir l’ordre social, de célébrer les rituels funéraires et d’offrir aux initiés une protection contre la maladie, l'infortune, les actions des génies malveillants et des sorciers antisociaux. Entre les cornes, un calao becquetant un singe, présente sur le front une coupe contenant les substances magiques. Sur la gueule réside une statue Senufo. 

De cet univers singulier où « s’accumulent les motifs animaux et les matières organiques en une composition spectaculaire, les forces sont nourries grâce à une série de sacrifices réguliers, dont les résidus, formant une croûte sur la surface du masque, les rendent de plus en plus terrifiants à contempler » (McNaughton, p. 179-180).

 
Courtesy of: Prouteaux, 1918

Courtesy of: Prouteaux, 1918